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Dans une affaire récemment jugée par le Tribunal Judiciaire de Paris le 5 avril 2024, un photographe contestait l'utilisation de ses œuvres photographiques par les sociétés de production du groupe de rock Superbus. Si la décision a confirmé l'originalité attachée aux clichés du photographe, les juges ont dû se livrer à une interprétation de l’étendue des droits cédés à défaut de mentions claires dans le contrat signé entre les parties.

 

Rappel des faits

Le 25 juin 2019, un photographe professionnel a réalisé des photographies des membres du groupe de musique Superbus dans le cadre de la promotion de la tournée du 20ème anniversaire du groupe et a consenti à leur exploitation par contrat de cession du 2 juillet 2019.

Estimant que ces clichés ont été exploités en dehors du champ du contrat de cession – notamment pour la pochette d’un single, sur le site Internet du groupe Superbus et divers produits dérivés – le photographe a assigné les sociétés de production du groupe en contrefaçon de ses droits d’auteur.

 

L’appréciation de l’originalité des photographie

Les défendeurs ont affirmé que le photographe n’avait fait preuve d’aucun effort créatif et s’était contenté de suivre les instructions des membres du groupe pour la réalisation des clichés photographiques (choix du lieu, sujet des photographies, cadrage, lumière, composition, etc.), et qu’ainsi les clichés n’étaient pas originaux et ne pouvaient donc pas bénéficier d’une protection par le droit d’auteur.

Cependant, aucun élément de preuve n’a permis de démontrer que des directives avaient été imposées au photographe et les juges ont justement rappelé que le seul fait que ces photographies fassent l’objet d’une commande selon un cahier des charges n’exclut pas – par principe – l’originalité des photographies.

Le Tribunal a retenu au contraire que les clichés en cause sont le résultat de choix libres réalisés par le photographe et témoignent d’une esthétique particulière résultant :

  • d’une unité caractérisée par le noir et blanc,
  • d’un éclairage latérale des visages,
  • de contrastes forts et un fond très clair,
  • de poses prises dans plusieurs attitudes traduisant un parti-pris de mettre en évidence une expressivité particulière du visage et de la silhouette des musiciens,
  • des positions respectives des membres du groupe Superbus, l’orientation de leurs regards, de leurs mains, de leurs bras et de leurs ombres.

Par ailleurs, la décision souligne qu’aucune autre photographie antérieure du groupe ne comporte de telles caractéristiques, démontrant ainsi que l’esthétique générale de ces photographies ne préexistait pas dans la communication du groupe.

Le Tribunal a dès lors considéré que l’ensemble de ces choix arbitraires suffisait à caractériser l’originalité des photographies et qu’elles sont protégées par le droit d’auteur.

 

La validité de la cession des droits d’auteur

Quoique très succincte dans sa rédaction, les juges ont validé la clause de cession des droits  stipulée dans une « note d’auteur » rédigée par le photographe, les conditions essentielles énumérées aux articles L.131-3 du Code de la propriété intellectuelle étant remplies, à savoir l’énumération des droits cédés, la délimitation de la cession quant à l’étendue, la destination, le lieu et la durée.

Le débat s’est avant tout cristallisé sur l’étendue des droits cédés. Le photographe considérait que les photographies ne devaient être exploitées que sous forme d’affiches de la tournée en question, mais la cession des droits consentie dans la « note d’auteur » ne précisait pas la nature des supports d’exploitation.

Le Tribunal a ainsi dû interpréter la volonté des parties en prenant en compte l’ensemble des pièces du dossier, à savoir :

  • que le demandeur a été sollicité et a fait un devis pour faire des photographies des membres du groupe “pour la tournée du 20ème anniversaire”, dont l’utilisation sous forme d’affiche et de “photos promo” était expresse,
  • qu’il a remis 18 clichés photographiques à et a cédé ses droits d’exploitation de “prises de vue Superbus” pour 3 ans en France, sans distinguer selon les supports

Au regard de l’emploi du pluriel (« prises de vue ») et de la durée de 3 ans consentie, le Tribunal a estimé que le photographe ne pouvait raisonnablement soutenir n’avoir entendu céder les droits attachés aux clichés que pour un usage sous forme d’affiche de la tournée, destinée à n’être utilisée que quelques mois.

Ainsi, l’exploitation des photographies devait être interprétée comme comprenant l’ensemble des usages promotionnels en lien avec la tournée.

 

Les actes de contrefaçon

Le photographe a relevé que la reproduction partielle de l’une de ses photographies pour illustrer la pochette d’un single du groupe n’était pas justifiée puisque ce dernier n’avait pas été réalisé dans le cadre de la promotion de la tournée du groupe.

Le Tribunal a ainsi estimé que cette exploitation constituait un acte de contrefaçon en retenant :

  • qu’elle s’inscrivait en dehors du champ de la cession consentie,
  • et, qu’en outre, l’atteinte à l’intégrité de la photographie (reproduction partielle de la photographie en cause ayant pour effet de rendre le cliché d’origine méconnaissable et de le dénaturer dans son objet et sa composition) et l’atteinte au droit de paternité (le nom du photographe n’étant crédité que sur l’affiche de la tournée et pas en lien avec les autres usages promotionnels réalisés) étaient caractérisés.

 

 Par Gwendal BARBAUT &  Audrey PICHOT

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