Par Sylvette BENQUET
Les fêtes de Noël et de fin d’années sont des périodes importantes en termes de revenus pour la plupart des entreprises.
Il peut être tentant de vouloir protéger à titre de marque des noms de fêtes comme « NOEL » ou l’expression de circonstance « Joyeux Noel », ce qui permettrait au titulaire d’interdire toute commercialisation, par les concurrents, des produits ou services sous ces termes. Le titulaire des marques augmenterait ainsi sa capacité d’attractivité.
Est-ce pour autant réalisable ?
Rappelons que pour être protégeable, une marque ne doit pas décrire les produits ou services sur lesquels elle sera apposée, ni une caractéristique essentielle de ces derniers comme par exemple l'espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique, l'époque de la production du bien ou de la prestation du service.
Un tour d’horizon sur l’appréciation de la validité des noms de fêtes déposés à titre de marque, permet de conclure, à juste titre, qu’un monopole ne peut être obtenu sur un nom, pour des produits ou services que les consommateurs associeraient directement à la fête en question.
Ainsi, la marque française « HALLOWEEN » a été refusée pour commercialiser des confiseries. Cette fête est en effet associée aux confiseries depuis son entrée en France et le monopole d’un tel nom par une seule personne, aurait empêché les acteurs de ce marché à utiliser librement ce terme pour les produits en question.
Dans cette même logique, la marque « SAINT VALENTINE » a été refusée en 2020 par l’office européen, pour des vêtements, chaussures et chapellerie. L'Office considère que la marque verbale "Saint Valentine" informe immédiatement les consommateurs que les produits désignés dans la demande, sont des articles à porter le jour de la Saint-Valentin ou des articles à offrir ce jour-là.
Le même raisonnement devrait en principe, s’appliquer à la fête de « NOEL » ou à l’expression usuelle « JOYEUX NOEL ».
De manière surprenante, une interrogation sur les registres des marques françaises ou européennes, permet de constater d’innombrables marques françaises, composées de ces seuls termes ou accompagnés de logos ou d’autres termes, pour différents produits ou services et quelques marques européennes.
Si l’on se concentre sur les marques composées de ces seuls termes, nous constatons la protection ancienne de la marque française « NOEL » pour des chaussures, la marque européenne « JOYEUX NOEL » pour des articles de parfumerie ou encore la marque européenne « NOEL » pour des confiseries et gâteaux.
A y regarder de plus près, on distingue une certaine différence d’appréciation par l’office européen et français.
L’office européen semblait accepter l’enregistrement de marques composées, seulement ou en partie, du terme « Noel ». Néanmoins une grande majorité des marques comprenant ce terme ont été enregistrées il y a plus d’une dizaine d’années. Cette période parait être révolue.
En effet, en mai 2023, l’office européen a refusé les tentatives de dépôt de la société NOEL ALIMENTARIA, sur le terme « NOEL » avec un logo, pour des produits alimentaires. L’office a considéré que le signe « Noel », tel que déposé en rouge et blanc, était aisément compréhensible par les consommateurs comme faisant référence à la fête chrétienne du même nom. L’office considère que les consommateurs concernés percevront le signe, comme fournissant des informations selon lesquelles les produits sont proposés à Noël, ou liés à Noël. Ce raisonnement est dans la même logique que les décisions sur les fêtes d’Halloween ou Saint VALENTINE citées plus haut.
L’office français, semble, quant à lui, avoir une appréciation plus souple concernant de tel dépôt. En effet, il peut être constaté qu’un nombre bien plus important de marques comprenant le terme « Noel » sont, encore aujourd’hui, déposées auprès de l’office français, avec des termes plus ou moins fantaisistes.
La validité du seul terme « NOEL » ne semble pas encore avoir été remise en cause même à l’occasion d’oppositions formées par la société NOEL France, sur la base de sa marque ancienne « NOEL », déposée notamment pour des chaussures. Il est possible cependant que cette entreprise ait pu acquérir une distinctivité de sa marque par un usage ancien, intense et régulier.
Ceci étant, aucune décision judiciaire, à notre connaissance, ne porte encore sur le sujet de l’appropriation des dits termes par le biais d’un dépôt de marque. Elles devraient néanmoins rejoindre l’appréciation générale des décisions européennes précitées.
Une chose est certaine, nous pouvons librement vous souhaiter « Un joyeux Noel » et de très belles fêtes de fin d’année, sans être inquiétés par les titulaires des marques relevées !